L’ikebana

Ikebana, mot formé à partir du verbe japonais hikeru 生, signifiant « faire vivre », et du mot hana 花, « les fleurs ».

L’ikebana est l’art de l’arrangement floral japonais également connu sous le nom de Kadô (la voie des fleurs – 華道).

Très présent dans la culture japonaise, on le trouve dans les rituels (cérémonie du thé) et les commémorations religieuses, mais surtout comme un loisir créatif pour se connecter à la nature, stimuler la créativité et la relaxation / méditation.

Cet art floral consiste à créer une construction artistique harmonieuse mettant en valeur chacune des parties constituant le bouquet. On valorisera ainsi autant les tiges, les feuilles, le fond, les fleurs, et le vase de la composition.

Importé de Chine et/ou de Corée autour du VIe siècle, l’ikebana est d’abord utilisé par les moines comme offrande dans les temples bouddhistes. Les compositions étaient alors basées sur de strictes symboliques religieuses.

Dès le Xème siècle, l’esthétique de la composition rivalise avec la symbolique.

Au XIIème siècle, l’ikebana continue à perdre de sa symbolique en se « démocratisant » dans les couches supérieures de la société japonaise. Durant ce siècle un nouveau courant nait alors, appelé Rikka. Ce style d’ikebana peut être reconnu grâce à sa forme particulière, les compositions Rikka formant un ensemble triangulaire.

Une composition de style rikka était un microcosme qui symbolisait l’univers tout entier par le biais de l’image du paysage qu’il représente. Les principales caractéristiques de ce style , l’asymétrie, le symbolisme et la profondeur spatiale, allaient avoir une influence sur l’évolution de l’ikebana jusqu’à nos jours.

Aux XVème et XVIème siècles, l’ikebana n’est plus seulement un art associé à la religion en s’associant à des cérémonies et événements de la vie de la haute société nippone. Un nouveau style se développe, appelé nageire (du verbe 投げる nageiru : jeter), plus simple et naturel, et les premiers traités explicitant cet art sont écrits, en particulier Senno Ikenobo dans un fameux manuscrit d’enseignement, «SENNO KUDEN»

Ikenobo Senno Kuden,
manuscrit de 1537

Ikenobo Sen’ei Kadensho,
manuscrit de 1545

Rikka shodo shu, Jiukyusai.,
manuscrit de 1684

composition de style Ikenobo

Face à la rigueur, le symbolisme et des techniques très élaborées du style rikkatranche avec la simplicité, la spontanéité et le naturel du style nageire ; cela forme deux visions assez opposées de l’ikebana sur lesquelles se sont développées les différentes écoles jusqu’à nos jours.

La période Meiji (1868 – 1912), avec l’ouverture du Japon au monde occidental vit naitre le style moribana, créé par Ohara Unshin (1861–1916), le fondateur de l’école Ohara.

En opposition avec les styles antérieurs, Ohara utilisa pour ces compositions différents types de supports pour arranger des plantes coupées dans un récipient large et peu profond, appelé suiban, littéralement « bassin d’eau ».

composition de style Ohara

Au XXème siècle, les innovations se succédèrent avec l’apparition de nombreuses autres écoles et, en particulier, l’école Sogetsu, fondée par Teshigahara Sofu (1900–
1979), qui voit l’ikebana comme un art devant encourager la libre expression créative.

composition de style Sogetsu

En dépit des divers courants et écoles, l’ikebana repose sur des principes fondamentaux, permettant de créer des compositions qui vont au-delà de la simple décoration pour devenir de véritables œuvres d’art reflétant la philosophie et l’esthétique japonaises.

Ces principes sont :

  • la structure triangulaire de la composition, basée sur trois points principaux symbolisant le ciel, la terre et l’homme (Taiso Fuku). Cette structure triangulaire, appelée Tai-Yo-Fuku, est représentée par des matériaux de différentes hauteurs.
  • le symbolisme : chaque élément de la composition a une signification symbolique. La branche la plus haute (Shin) représente le ciel, la branche moyenne (Soe) représente l’homme, et la branche la plus basse (Tai) représente la terre.
  • le minimalisme : l’ikebana privilégie la simplicité et l’espace entre les éléments. Les compositions sont souvent minimalistes, mettant en valeur la beauté naturelle des plantes.
  • l’harmonie et l’équilibre : l’arrangement doit créer une harmonie entre les lignes, les rythmes et les couleurs. On recherche un point d’équilibre vers lequel tous les éléments convergent.
  • l’asymétrie : contrairement aux compositions florales occidentales, l’ikebana favorise l’asymétrie pour accentuer la dynamique et le naturel.
  • la valorisation de tous les éléments : la composition met en valeur non seulement les fleurs, mais aussi les tiges, les feuilles, les branches et même le vase.
  • une représentation tridimensionnelle : la composition cherche à créer un paysage en trois dimensions, valorisant la profondeur, l’espace et l’asymétrie.
  • le respect des saisons : les arrangements sont souvent conçus pour refléter la saison en cours en utilisant des matériaux saisonniers.
  • l’éphémérité : l’ikebana accepte et célèbre la nature éphémère des arrangements floraux, considérant le processus de création comme aussi important que le résultat final.

On constate donc la grande promiscuité avec les principes de la philosophie zen :

  • Simplicité et minimalisme : le zen valorise la simplicité comme moyen de se concentrer sur l’essentiel
  • Interdépendance : ce principe souligne que tout dans l’univers est interconnecté dans un réseau complexe de causes et d’effets
  • Wabi-sabi : Cette esthétique zen trouve la beauté dans l’imperfection et la simplicité


Aujourd’hui, les principales écoles d’ikebana sont :

l’école Ikenobo : la plus ancienne école, fondée au 15e siècle à Kyoto. Elle se caractérise par un enseignement technique complexe et codifié, avec une théorie cosmogonique. Elle développe les styles rikka et shoka.









l’école Ikenobo : la plus ancienne école, fondée au 15e siècle à Kyoto. Elle se caractérise par un enseignement technique complexe et codifié, avec une théorie cosmogonique. Elle développe les styles rikka et shoka.









l’école Sogetsu : créée en 1927, c’est l’école la plus moderne et libérale. Elle encourage la créativité personnelle et la création de sculptures modernes avec des végétaux.










Une référence aux articles relatifs à l’ikebana, parus dans la revue Esprit Bonsaï est disponible dans la rubrique Ressource/Livres et revues spécialisés/Bibliographie-ikebana/

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